La question de la régularité du recours à la visio lors du contrôle de la régularité de la rétention administrative par le juge des libertés et de la détention

La possibilité de recourir à la visioconférence dans le cadre des audiences relatives au contrôle de la rétention administrative existe depuis 2003. La loi posait alors comme condition obligatoire le consentement de l’étranger.
Cette condition a néanmoins disparu avec la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie du 10 septembre 2018.

Désormais, aux termes de l’article L.743-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
« Le juge des libertés et de la détention peut décider, sur proposition de l’autorité administrative, que les audiences [portant sur le contrôle de la rétention] prévues à la présente section se déroulent avec l’utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle garantissant la confidentialité de la transmission. Il est alors dressé, dans chacune des deux salles d’audience ouvertes au public, un procès-verbal des opérations effectuées ».

Saisi du contrôle de constitutionnalité de cette loi, le Conseil Constitutionnel a estimé que ces dispositions ne portaient pas atteinte au droit au recours effectif, aux droits de la défense et au droit à un procès équitable dès lors que le recours aux moyens de télécommunication est « subordonné à la condition que soit assurée la confidentialité de la transmission entre le tribunal et la salle d’audience spécialement aménagée à cet effet, ouverte au public et située dans des locaux relevant du ministère de la justice » (Décision n° 2018-770 DC du 6 septembre 2018).

Récemment, le Juge des libertés et de la détention de Rennes a recouru à la visioconférence pour statuer sur la prolongation d’une mesure de rétention administrative en raison des difficultés d’escorte rendant impossible l’extraction de l’étranger du centre de rétention administrative.

L’étranger a été entendu depuis la salle de visioconférence installée au sein du centre de rétention administrative.
Saisie d’un recours sur la décision de prolongation de la rétention, la Cour d’appel de Rennes a rappelé que le recours à la visioconférence « doit être strictement encadré dans un lieu de justice et non dans des locaux gérés par le ministère de l’Intérieur » et que cela suppose « la tenue d’une audience dans une salle à proximité du lieu de rétention, spécialement aménagée pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats permettant au juge de statuer publiquement, et ce dans chacune des deux salles ouvertes au public ».

Or en l’espèce, la Cour a retenu que l’étranger a été entendu dans les locaux du centre de rétention, sans qu’il soit mentionné une salle à proximité du centre spécialement aménagée offrant des garanties de confidentialité et de transmission des débats. En l’occurrence, les débats ont eu lieu dans un lieu fermé au public qu’est le centre de rétention administrative.

En conséquence, la Cour d’appel de Rennes a conclu à la violation du droit à un procès équitable et annulé la décision de prolongation de rétention administrative, faisant ainsi droit à l’appel formé (Cour d’appel de Rennes, 24 juin 2022, n° RG 22/00368).